Les coiffures de Marie-Antoinette
Mode et Beauté Vie de Château

Les coiffures de Marie-Antoinette : l’art de l’extravagance

Accueil » Vie de Château » Les coiffures de Marie-Antoinette : l’art de l’extravagance

Marie-Antoinette, reine de France guillotinée pendant la Révolution est une des souveraines les plus connues de l’histoire et pour cause : sa vie à la cour de France, sa fin tragique, ses choix personnels ont inspiré de nombreux auteurs et cinéastes, qui ont fabriqué à son personnage une aura immortelle. Elle est sans aucun doute l’icône de mode par excellence du XVIIIᵉ siècle. Très coquette, Marie-Antoinette a contribué à populariser la robe à la française, caractérisée par un corsage ajusté et une jupe ample. Ses choix de tissus étaient somptueux, avec des brocarts, des soies et des dentelles coûteuses, ce qui a considérablement influencé la mode de l’époque. Mais un élément l’a particulièrement fait connaître : ses coiffures. Toutes plus extravagantes et monumentales les unes que les autres, les coiffures de Marie-Antoinette, incroyablement élaborées et hautes, souvent ornées de rubans, de plumes et de bijoux, ont influencé toutes les dames de la cour. Je vous raconte les secrets derrière ces véritables œuvres d’art. 

Léonard, le créateur des coiffures de Marie-Antoinette et le coiffeur des stars du XVIIIᵉ siècle

Léonard-Alexis Autié
Portrait de Léonard-Alexis Autié

Il est rare de voir dans l’Histoire des enfants de basse extraction connaitre un destin aussi incroyable. Léonard est de ceux qui peuvent se vanter d’être entrés dans l’intimité de la reine. 

Une ascension fulgurante

Léonard-Alexis Autié n’est pas de noble ascendance. Il naît dans le Languedoc, dans la petite ville de Pamiers. Ses deux parents sont domestiques, mais la coiffure est une affaire de famille : les deux autres frères de Léonard-Alexis, dont les prénoms commencent, eux aussi, par Léonard (pas très pratique…) deviendront également coiffeurs. Le jeune Léonard commence sa carrière d’abord à Bordeaux puis à Paris, en coiffant des artistes de petits théâtres, comme Julie Niébert, qui officie au théâtre du célèbre Jean-Baptiste Nicolet.

Il a déjà tout d’un grand : son audace, son extravagance et son sens du style attirent l’œil. C’est ainsi qu’il commence une ascension fulgurante : d’abord repéré par la fameuse Jeanne du Barry, maîtresse de Louis XV, la marquise de Langeais le prend à son service. Heureuse rencontre : celle-ci n’est autre que la dame de compagnie de la Dauphine Marie-Antoinette. 

Marie-Antoinette et Léonard, un coup de foudre artistique

Marie-Antoinette profite aux alentours de 1772 des talents d’un coiffeur du nom de Larseneur. Mais elle n’apprécie pas vraiment ses services : il est assez vieux, proche de la retraite et a une manière de coiffer très académique. Lorsqu’elle rencontre Léonard, une sorte de coup de foudre artistique se produit. Chaque jour, Larseneur arrive auprès de Marie-Antoinette et fait son travail : il la brosse et la coiffe. Elle le laisse achever son office et, lorsqu’il a terminé et se retire de ses appartements après des inclinaisons respectueuses. Léonard s’introduit ensuite en catimini, grâce à une demoiselle d’honneur, dans les appartements privés pour pouvoir défaire le travail de son confrère et tout recommencer au goût de la Dauphine. 

Le pouf, une des plus emblématiques coiffures de Marie-Antoinette qui signe l’avènement de Léonard

À partir du début de l’année 1774, Marie-Antoinette décide avec Rose Bertin, sa styliste, de relancer une sorte de cahier des modes à la Cour, appelé très élégamment “Le journal des Dames”. Elle associe Léonard au projet, finance l’intégralité des sommes nécessaires à la rédaction et à la publication du magazine et le premier numéro remporte un grand succès. La raison ? Il met en avant les coiffures, parures et tenues de la future reine. Une de ses coiffures, imaginée par Rose Bertin retient particulièrement l’attention des précieuses de la Cour : le “ques-a-co, une sorte de point d’interrogation formé par trois plumes fixées à l’arrière de la tête. Toute la cour ne porte alors plus que ça et Jeanne du Barry elle-même rapporte apprécier particulièrement cette coiffure.

Piqué au vif et jaloux qu’une telle idée ne vienne pas de lui, Léonard crée le pouf en avril 1774. D’abord aperçu sur la duchesse de Chartres, le pouf est une œuvre d’art, sorte d’échafaudages, de tulle, de plumes, de fleurs, d’objets insolites couplés d’une perruque, de faux cheveux dressés à la verticale. Marie-Antoinette l’adopte ensuite à son tour et le porte même lors du sacre de Louis XVI. C’est un immense succès : la mode est lancée, tout le monde porte cette coiffure à la cour.

Les poufs

L’avantage du pouf ? Chacun est libre de l’adapter à ses envies et son humeur et les possibilités de déclinaisons sont infinies. Plus c’est extravagant, plus ça plaît. Certains poufs dépassaient le mètre et étaient lourds de plusieurs kilos. Les dames les plus riches s’en faisaient confectionner pour plus de 50 000 livres ( aux alentours de 65 000 euros) et en changeaient presque tous les jours. Confectionner un pouf directement sur la tête d’une dame pouvait prendre tout l’après-midi. Mais ce raffinement avait un prix inconfortable : très compliqué à enlever et à remettre, les précieuses dormaient régulièrement avec ce qui ne devait pas être très agréable. 

Les coiffures de Marie-Antoinette les plus célèbres

Léonard remplace définitivement Larseneur qui prend sa retraite en 1780. Excentrique, piailleur, râleur, narcissique et légèrement vénal, Marie-Antoinette accorde tout de même sa confiance à son coiffeur officiel, qui devient un de ses plus intimes amis, tout comme Rose Bertin, qui donne elle-aussi son avis sur la coiffure. Les deux créent ensemble les coiffures de Marie-Antoinette, des modèles uniques qui resteront dans l’Histoire. 

Le ques-a-co

Les coiffures de Marie-Antoinette le Ques-à-co
Le ques-a-co, créé par Rose Bertin
©Wikimedia Commons

Trois grandes plumes sont fixées à l’arrière de la tête des dames pour fomer ensemble une sorte de point d’interrogation. Cette coiffure émerge aux alentours de 1774 et est porté par toutes les plus grandes dames de la Cour, notamment Madame du Barry et Madame de Polignac

Le pouf aux sentiments

Les coiffures de Marie-Antoinette le pouf aux sentiments
Le pouf aux sentiments

Créée par Léonard, cette coiffure nécessite des heures de travail. Elle consiste à accumuler sur une perruque immense dont les cheveux tiennent à la verticale des parures, objets en tout genre, plumes, ruban, perle etc… Les poufs pouvaient peser jusqu’à 5 kilos et pouvaient tenir jusqu’à deux semaines sur la tête de sa propriétaire qui, si elle ne voulait pas en changer, était obligée de dormir avec. Le pouf reflétait l’humeur et les sentiments de celle qui le portait, d’où son nom : le pouf aux sentiments

À la Belle Poule

Coiffure à la belle poule
Coiffure « À la Belle Poule »

La plus célèbre des coiffures de Marie-Antoinette est sûrement « À la Belle Poule », du nom du navire de guerre français utilisé de 1765 à 1780. Cette perruque fut créée à l’occasion de sa première victoire sur la marine britannique, le 17 juin 1778. La perruque en question mesure presque 1 mètre de haut et est composée de faux cheveux ainsi que d’un navire, toutes voiles dehors, fixé au sommet du crâne. 

Le pouf à la circonstance 

Ce pouf célèbre l’avènement de Marie-Antoinette et Louis XVI sur le trône de France et l’espoir qui renaît. On trouve ainsi sur la perruque des plumes blanches, un cyprès d’un côté et une corne d’abondance de l’autre. 

Le pouf à la jardinière, à la victoire, au levant.. parmi les coiffures phares de Marie-Antoinette

Les coiffures de Marie-Antoinette À la victoire
Coiffure à la Victoire à la Candeur par Gabriel de Saint-Aubin, Musée Franco-Américain

Léonard confectionna à Marie-Antoinette un pouf composé de fleurs, de légumes du jardin, de pousses de pommes de terre pour que les Français n’aient plus peur de manger ce légume terreux venu des Amériques. Les poufs étaient adaptés à chaque circonstance, à chaque opéra à la mode, évènement, choses insolites qui jalonnaient la vie de la cour de France. On en trouve ainsi de toutes sortes, tous plus étonnants les uns que les autres.

Marie-Antoinette et Léonard, accompagnés de Rose Bertin ont ainsi révolutionné la mode et la coiffure au XVIIIᵉ siècle. Portés par leur sens du goût et leur extravagance, les coiffures de Marie-Antoinette et cette mode de la coiffe haute et luxueuse perdureront jusqu’à la Révolution, où elle tombera en désuétude en même temps que l’abolition des privilèges.