Maison royale de Saint Louis
Anecdotes

La Maison Royale de Saint-Louis

Accueil » Anecdotes » La Maison Royale de Saint-Louis

La Maison Royale de Saint-Louis a été créée le 15 juin 1686 par Louis XIV à la demande de Madame de Maintenon, afin de venir en aide aux jeunes filles nobles dont les familles étaient devenues pauvres. Cette institution a connu le passage de nombreuses personnalités du XVIIème et XVIIIème siècle et a même fait l’objet d’un film, avec Isabelle Huppert dans le rôle de Madame de Maintenon. 

La Maison royale de Saint- Louis, une volonté de Madame de Maintenon

La jeunesse de Madame de Maintenon, à l’origine de son envie d’une maison d’éducation

Maison royale de saint louis madame de maintenon
Portrait de Madame de Maintenon

Madame de Maintenon, née Françoise d’Aubigné, est issue d’une famille noble mais ruinée et a toujours regretté son éducation, qu’elle trouvait limitée car uniquement dispensée par des religieuses. Les matières enseignées dans les couvents tournaient à l’époque essentiellement autour de la liturgie,  de la prière et de la religion en général, ce qui empêchait les jeunes filles d’être préparées à ce qui les attendaient à leur sortie. 

Grâce à son premier mari, le poète Scarron, Françoise est initiée aux milieux intellectuels et littéraires, et se découvre, en devenant gouvernante des enfants de Louis XIV et de Madame de Montespan, une vocation d’enseignante


La fondation de la Maison royale de Saint-Louis, un travail de longue haleine

maison royale de saint louis un travail de longue haleine
Maison royale de Saint Louis – Gravure du XVIIIème siècle – ©Milena2

C’est en 1680 que Madame de Maintenon fait la connaissances de deux religieuses, Madame de Brinon et Madame de Saint-Pierre, qui s’occupe d’une écoles pour jeunes filles pauvres, leur assurant une place de domestique dans les grandes familles. 

En 1681, elle loue à Rueil une maison qu’elle aménage pour y recueillir une vingtaine de jeunes filles pauvres issues de la noblesse et le 3 février 1684, le roi Louis XIV lui offre le château de Noisy-le-roi pour pouvoir y accueillir plus de 180 pensionnaires

Le roi ne s’arrêtera pas là pour aider sa favorite Madame de Maintenon : le 5 août 1684, Louis XIV décrète la fondation “d’une maison et d’une communauté où un nombre considérable de jeunes filles, issues de familles nobles et particulièrement des pères morts dans le service seront entretenues et instruites gratuitement, en sorte qu’après avoir été élevées dans cette communauté, celles qui en sortiront puissent porter dans toutes les provinces de notre royaume des exemples de modestie et de vertu

Pour mener à bien cette mission, Madame de Maintenon se voit attribuer le domaine de Saint-Cyr en 1685, et le roi ordonne de grands travaux sur le domaine, dirigés par le fameux Jules-Hardouin-Mansart. En juin 1686, après quinze mois de travaux, la marquise peut y installer ses pensionnaires et la Maison Royale de Saint-Louis est officiellement créée. 

La Maison Royale de Saint-Louis, un établissement aux règles strictes et bien définies

Un droit d’entrée spécifique

Seules sont admises dans l’établissement les filles des gentilshommes tués ou ayant ruiné leur santé et leur fortune pour le service de l’État. Elles sont appelées “Demoiselles de Saint-Cyr” et ne peuvent être recrutées qu’entre 7 et 12 ans. C’est Louis XIV lui-même qui décide de leur admission après réunion d’un conseil généalogique, qui s’assure que la noblesse des postulantes date d’au moins 140 ans.  

Une organisation millimétrée 

la maison royale de saint cyr demoiselles de saint cyr
Deux demoiselles de Saint-Cyr

La maison peut accueillir 250 pensionnaires. Elles sont sous la responsabilité de 36 dames éducatrices et 24 sœurs, mais aussi de quelques prêtres.

Âgées de 7 à 20 ans, les élèves sont réparties en 14 classes en fonction de leur âge et portent toutes la même robe marron et le même bonnet blanc. Seul signe distinctif : le ruban de couleur qui noue leur robe, permettant ainsi de connaitre leur classe :
– un ruban « rouge » de 7 à 10 ans
– un ruban « vert » de 11 à 13 ans
– un ruban « jaune » de 14 à 16 ans
– un ruban « bleu » de 17 à 20 ans.

Chaque classe est dirigée par une maîtresse de classe, aidée par une ou plusieurs sous-maîtresses. Ces enseignantes doivent, même si elles ne sont pas religieuses, prononcer des vœux temporaires de loyauté, de chasteté et d’obéissance. 

Les élèves sont accueillies à Saint-Cyr jusqu’à l’âge de 20 ans et ne peuvent quitter la maison qu’en cas de renvoi, de mariage ou de circonstances familiales exceptionnelles. Lorsqu’elles quittent l’établissement à la fin de leurs études, elles reçoivent une dot de 3 000 livres destinée à leur assurer un mariage convenable ou leur permettre d’entrer au couvent. 

La Maison Royale de Saint-Louis, entre rayonnement et controverses

Des représentations théâtrales prisées

esther représentation
Racine fait répéter Esther par les élèves de Saint-Cyr devant Louis XIV et Mme de Maintenon

Parmi les matières enseignées à la Maison Royale, se trouve notamment le théâtre. Les pensionnaires jouent d’abord des pièces écrites par Madame de Brinon et Madame de Maintenon, avant que celle-ci ne projette de faire leur faire jouer « Esther », une pièce de Racine, devant le roi et la Cour.

Esther est représentée pour la première fois le 26 janvier 1689 à Saint-Cyr en présence de Louis XIV, de Madame de Maintenon et de nombreux autres courtisans. Ce sont des jeunes filles de la classe jaune qui sont principalement choisies. Madame de Maintenon fait fabriquer pour elles des costumes ornés de diamants et de pierres précieuses.  La préparation de la représentation coûte au total plus de 14 000 livres

Le roi et ses courtisans applaudissent la pièce, si bien qu’assister à une représentation d’Esther ( il y en a eu 4 au total ) est considéré comme un grand honneur

Cependant, le théâtre déplait rapidement à Madame de Maintenon, qui craint que les demoiselles de Saint-Cyr ne deviennent non seulement la proie des courtisans mais surtout trop orgueilleuses. 

Des pensionnaires célèbres qui font sa réputation

Elisa Bonaparte
Portrait d’Elisa Bonaparte, qui a été pensionnaire de Saint-Cyr

La plus connue des pensionnaires qui fréquenteront Saint-Cyr est sans nul doute Louise de Maisonblanche, fille illégitime de Louis XIV et d’une dame de compagnie de Madame de Montespan, Melle Desoeillets. À l’état civil, elle est déclarée fille de Philippe de Maisonblanche, ancien capitaine de cavalerie et de dame Gabrielle de la Tour, son épouse. En réalité, il n’en est rien et elle est d’abord élevée par sa mère à Paris, avant de rejoindre la maison royale lorsque celle-ci meurt. Elle se marie à Bertrand du Prez de la Queue, lieutenant de cavalerie de Bourgogne. Sa dot, financée par Louis XIV se monte à 40 000 livres, uniquement composée d’argent et de bijoux, sans terre ni maison. On raconte qu’elle ne sort à la Cour de Versailles que voilée, par peur du scandale, car elle ressemble beaucoup à Louis XIV, qui ne la reconnaîtra jamais comme sa fille. 

Marthe Marguerite de Caylus, nièce de Madame de Maintenon, fait également partie des Demoiselles importantes : elle devient femme de lettre et mémorialiste et écrit notamment “Souvenirs de Madame de Caylus”, ses mémoires, qui donnent d’importants renseignements sur la vie à la Maison Royale mais aussi sur Madame de Maintenon, qui la considère comme sa fille. Son talent est salué par Voltaire lui-même

Autre pensionnaire célèbre : Elisa Bonaparte, sœur de Napoléon Ier. En juin 1784, grâce à une bourse d’études, elle est envoyée à la Maison Royale de Saint Louis où son frère lui rend plusieurs visites durant ses études, lors de sa formation militaire à Paris. Elle y reste jusqu’à la fermeture de l’établissement en 1792


Madame de Maintenon et Madame de Brinon, une querelle ravageuse

Madame de Brinon est depuis la création de la Maison Royale, la supérieure de l’établissement. Elle n’apprécie guère Madame de Maintenon, qu’elle trouve trop orgueilleuse et trop présente. La représentation d’Esther entérine leurs désaccords : Madame de Brinon ne veut pas d’une telle pièce, qu’elle soupçonne de ne servir qu’à la gloire de Madame de Maintenon. Elle est renvoyée par lettre de cachet le 10 décembre 1688 et est nommée à sa place, Madame de Loubert, ancienne secrétaire de Madame de Maintenon. 

La fin de l’ouverture au monde

Les deux projecteurs de conscience de Madame de Maintenon, l’abbée Fénelon et l’abbé Paul Godet des Marais la mettent en garde et lui demandent de faire revenir l’humilité et la simplicité à Saint-Cyr. Les règles deviennent alors plus strictes, et les livres autres que religieux sont interdits. 

De plus, en novembre 1692 est décidée la transformation de la Maison Royale en couvent : Les éducatrices doivent alors faire un choix entre prononcer des vœux solennels et devenir religieuses, ou quitter la Maison royale. 

Lorsque Louis XIV meurt en 1715, Madame de Maintenon se retire à Saint-Cyr où elle meurt en 1719. Elle est enterrée dans la chapelle de l’école. 

La Maison royale de Saint-Cyr : une fin brutale mais une postérité assurée  

La Révolution entraîne la fermeture de l’école

La sœur de Louis XVI, Mademoiselle Elisabeth, fait fêter le centenaire de l’école en 1786. À partir de là, la Révolution fait son oeuvre. L’abolition des privilèges rend compliquée l’existence d’une école uniquement destinée aux filles de bonnes familles. En 1790, Louis XVI autorise par décret l’admission dans l’établissement de jeunes filles non issues de la noblesse. Mais cela ne suffira pas : l’Assemblée législative décrète sa fermeture en 1792

Une influence certaine 

maison royale de saint louis légion honneur
Maison d’éducation de la Légion d’Honneur, telle que voulue par Napoléon au XIXème siècle

La Maison royale de Saint-Cyr inspira à Napoléon Bonaparte la création de la Maison d’éducation de la Légion d’Honneur, qui existe encore aujourd’hui. En Russie, Madame de Laffont s’inspira de la Maison royale de Saint-Louis pour créer l’Institut Smolny à Saint Pétersbourg. Enfin, d’anciennes pensionnaires, en entrant dans des couvents, répandirent la pédagogie de la Maison royale, entraînant la modification progressive des méthodes de tous les couvents importants, qui prirent davantage en compte l’instruction et le bien-être de leurs élèves

Ainsi, si la Maison Royale d’Éducation de Saint-Louis a disparu, son esprit a tout de même perduré au sein d’autres importantes institutions et a permis à Madame de Maintenon de laisser une trace indélébile à l’Histoire. De plus, depuis le milieu du XXème siècle, les bâtiments de la Maison Royale abritent le célèbre et prestigieux lycée militaire de Saint-Cyr