Marie Thérèse de France
Personnages historiques

Marie-Thérèse de France, l’orpheline aux mille vies

Accueil » Personnages historiques » Marie-Thérèse de France, l’orpheline aux mille vies

Marie-Thérèse Charlotte de France, dite Madame Royale, est la première des 4 enfants du couple formé par Louis XVI et Marie-Antoinette. Elle a vécu une enfance plus que mouvementée, au coeur de la Révolution, et a dû notamment surmonter la mort de ses parents, de son frère Louis XVII et de sa tante, Madame Elisabeth. Trois fois exilée, elle mourra loin de son pays la France, non sans avoir marqué les esprits de ses admirateurs ou de ses détracteurs. 

Marie-Thérèse de France, une aînée attendue 

Une naissance après plus de huit ans de mariage

Marie Thérèse de France Louis XVI MA
Mariage de Louis XVI et Marie-Antoinette

Lorsque Louis XVI se marie à Marie-Antoinette, ils ont respectivement 15 et 14 ans, et ce projet de mariage est prévu depuis plus de 12 ans. Le 16 mai 1770, le roi Louis XV donne des conseils à son petit-fils pour la nuit de noces : c’est peine perdue, le mariage n’est consommé que 7 ans plus tard

L’absence persistante de grossesse de la future reine Marie-Antoinette durant ces années lui vaut le courroux de sa mère, Marie-Thérèse d’Autriche, mais est aussi un argument de poids pour les détracteurs de la monarchie des bourbons. De plus, Louis XVI souffre d’une malformation du frein du prépuce, qui rend douloureuses les relations sexuelles. Il faudra attendre 1778 pour qu’un enfant voit le jour : Marie-Thérèse-Charlotte, une jolie petite fille, qui n’est pas l’héritier mâle tant attendu mais qui rassure sur les capacités génitrices des époux royaux. La première des enfants de Marie-Antoinette d’Autriche et Louis XVI est née !

“Mousseline la sérieuse”

Madame Royale, mousseline la sérieuse
Portait de Marie-Thérèse enfant

Marie-Thérèse naît au château de Versailles le 19 décembre 1778 et est baptisée le jour même dans la chapelle du château par le grand aumônier de France, le cardinal Louis de Rohan. L’écrivain Saint-Simon la qualifie de “fille de France jusqu’à la chaise percée”, car elle a un caractère bien trempé et aime paraître hautaine et orgueilleuse. Elle a une certaine complicité avec son père Louis XVI, mais les relations avec sa mère Marie-Antoinette sont plus compliquées car celle–ci tente de combattre le penchant têtu et hautain de sa fille. Elle la surnomme pour cela “Mousseline la sérieuse”

“Madame Royale”

Marie-Thérèse-Charlotte est plus couramment appelée par son troisième prénom, Charlotte. Mais le peuple et les courtisans lui affuble le surnom de “Madame Royale”, pour la distinguer de sa tante ( belle-soeur de Louis XVI ), la comtesse de Provence, que l’on surnomme aussi Madame

Marie-Thérèse de France, la fin de l’innocence

Vivre une révolution à 10 ans

Marie Thérèse de France révolution 10 ans
Retour de la famille royale à Paris après la fuite à Varennes

Si elle passe la première partie de son enfance choyée et privilégiée dans les pièces du château de Versailles, cette tranquillité apparente va vite tourner court. Le 6 octobre 1789, une foule envahit le château de Versailles, massacrant au passage quelques gardes du corps, et la famille royale est obligée de déménager au Palais des Tuileries à Paris

Autre élément traumatisant pour la jeune princesse : en 1791, ses parents tentent de fuir la France, déguisés en simples gens du peuple, et attribués de faux-noms. Ils sont découverts à Varennes, et la jeune Marie-Thérèse de France doit subir la honte du retour à Paris. La famille royale est d’abord enfermée au Couvent des Feuillants, avant d’être transférée dans la prison du Temple

Marie-Thérèse de France, l’orpheline du temple

Marie Thérèse de France une orpheline au temple
Séparation de la famille royale dans la prison du Temple

Les révolutionnaires lui affublent le nom républicain de Thérèse Capet, et elle est d’abord enfermée dans la même pièce que son frère Louis XVII, sa mère et sa tante Elisabeth. Son père lui, est séparé du reste de la famille et est guillotiné le 21 janvier 1793. Sa mère Marie-Antoinette est ensuite transférée à la Conciergerie, et son petit frère Louis confié à un précepteur révolutionnaire, Antoine Simon. Elle reste donc seule au Temple avec sa tante Elisabeth. 

Sa tante finit par être guillotinée le 10 mai 1794 et Madame Royale, 15 ans, se retrouve seule. Elle n’adresse plus la parole à ses gardiens, sombre dans une profonde dépression et écrit des graffitis sur les murs de sa cellule, criant son chagrin

Vive ma bonne mère que j’aime bien et dont je ne peux savoir des nouvelles.
Ô mon père, veillez sur moi du haut du ciel !
Ô Mon dieu, pardonnez à ceux qui ont fait mourir mes parents !


À la mort de Robespierre, sa tristesse commence à s’apaiser : ses conditions de détention s’améliorent et ses gardiens tentent de lui redonner le moral. Oui mais voilà : le malheur s’acharne sur Marie-Thérèse de France, qui perd son frère le 8 juin 1795 à l’âge de 10 ans de la tuberculose. La princesse apprend cette nouvelle de la dame de compagnie qu’elle vient d’obtenir, Madame de Chanterenne, qu’elle surnomme Rénette. 

Seule rescapée de la famille royale, Madame Royale devient célèbre et on parle partout en France de “l’Orpheline du Temple”. Elle est en effet, l’ultime espoir des royalistes, qui voient en elle et dans le futur Louis XVIII, frère de Louis XVI réfugié à l’étranger, le seul moyen de rétablissement de la monarchie absolue.

Un premier exil sous le signe du réconfort pour Madame Royale

Marie-Thérèse de France Duc d'angoulême
Madame Royale et son époux le duc d’Angoulême

Le 30 juin 1795, la Convention décide par décret de l’échanger avec l’Autriche contre des prisonniers politiques. Marie-Thérèse de France quitte le Temple le jour de ses 17 ans, le 19 décembre 1795, et se rend à Bâle où elle est remise aux envoyés de l’empereur d’Autriche François II, son cousin germain

Madame Royale s’intègre plutôt bien au sein de sa famille autrichienne, et ne tient plus son cousin François II comme responsable de la mort de sa mère. Vient à présent l’idée de la marier avec l’archiduc d’Autriche Charles-Louis, frère de l’empereur, considéré en France comme un ennemi.

Elle refuse, lui préférant Louis-Antoine d’Artois, duc d’Angoulême, fils aîné du futur Charles X avec qui elle entretient une correspondance pendant près de pendant trois ans. Elle l’épouse en 1799 et se voit donc affublée d’un énième titre, celui de duchesse d’Angoulême

Madame Royale, la princesse sans patrie 

Un lien fort avec Louis XVIII

Madame Royale lien avec Louis XVIII
La famille royale autour de Louis XVIII par Antoine-Jean-Baptiste Thomas

Madame Royale partage l’exil de Louis XVIII à partir de juin 1799, au château de Mittau, dans l’actuelle Lettonie. Il l’érige en figure de martyre et elle devient très populaire, passant plus de temps avec son oncle qu’avec son mari. Elle est la figure de proue des royalistes, qui voit en elle l’assurance d’un avenir monarchique.

Elle devient une héroïne dont les malheurs servent finalement la royauté, devenant même le personnage principal d’un roman, écrit par la baronne de Méré en 1799 “Irma ou les malheurs d’une jeune orpheline” qui transpose la vie de Marie-Thérèse à celle d’une jeune fille en Inde. 

Marie-Thérèse de France poursuit ensuite son exil en Pologne puis en Angleterre, avant de revenir en France en 1814, lors de la 1ère Restauration. 

Marie-Thérèse de France, “le seul homme de la famille”

Marie Thérèse de France le seul homme de la famille
Portait de Marie-Thérèse de France

Marie-Thérèse rentre à Paris le 3 mai 1814, après la chute de Napoléon. Physiquement marquée ( elle s’est légèrement affaissée et a une infection aux yeux, qui lui vaut le surnom de “la princesse aux yeux rougis” ), son retour est triomphant : Louis XVIII ne cesse de la mettre en avant, les femmes s’évanouissent sur son passage lorsqu’elle se promène, elle est l’emblème de la France, on voit en elle quelqu’un de modéré qui réconcilie les français alors que c’est tout le contraire : elle est plus monarchiste que Louis XVIII, influencé par son beau-père, le duc d’Artois et futur Charles X. 

À 36 ans, son passé au Temple lui colle à la peau et elle est presque une héroïne romantique. Son image est instrumentalisée par les journaux, mais en réalité on ne sait pas grand chose de sa vraie personnalité

Lorsque Napoléon revient au pouvoir pendant les 100 jours en mars 1815, Marie-Thérèse de France est chargée par Louis XVIII de défendre Bordeaux, où elle jouit d’un grand soutien de la population, mais pas des garnisons. Elle tente en vain de convaincre les soldats bordelais de rallier sa cause, mais doit se contraindre à envisager l’exil en Angleterre une seconde fois le 2 avril. 

Des territoires anglais elle tente d’organiser une rébellion, en fournissant des armes aux vendéens. Napoléon, saluant son courage, dira d’elle qu’elle “est le seul homme de la famille des Bourbons”. Le peuple aussi la vénère : elle devient l’héroïne de bordeaux. Cependant, cette image change peu à peu et l’opinion publique fait volte-face : elle ne peut être érigée en héroïne, car elle est le symbole d’une guerre civile, d’une réconciliation impossible entre monarchistes et républicains. 

Une première dame de France aux airs de phoenix

Ultime retour en France pendant la seconde restauration

Marie-Thérèse de France ultime retour en France

Pendant la seconde restauration en 1815, Louis XVIII n’a plus de femme et sa maîtresse, la comtesse de Cayla, ne peut jouer aucun rôle officielle. C’est tout naturellement que Marie-Thérèse endosse la coiffe de première dame de France pendant les cérémonies officielles. Elle subit cependant un autre revers : elle n’arrive pas à avoir d’enfant avec son mari, le duc d’Angoulême. Elle soutient les ultraroyalistes et s’occupe de plusieurs oeuvres caritatives, en subventionnant la Société de charité maternelle, l’infirmerie Marie-Thérèse, le pensionnat de Versailles. Son implication dans ces dernières lui vaut un retour en grâce aux yeux du peuple français et lui vaut une nouvelle réputation : celle de sainte royale

En 1824, Louis XVIII meurt, laissant sa place sur le trône à son frère, Charles X, beau-père de Marie-Thérèse de France. Elle devient alors Dauphine de France à 46 ans. Elle parcourt les provinces du royaume, pour faire connaître la famille royale et assurer le soutien du peuple à la monarchie

Marie-Thérèse de France est exilée une nouvelle fois

Charles X prévoit d’abdiquer en 1830 suite à une énième révolution. Laissant à penser que le duc d’Angoulême, mari de Madame Royale, prendra sa place sous le nom de Louis XIX, et que celle-ci pourra donc devenir reine. Mais Charles X choisit d’abdiquer en faveur de son petit-fils, Henri d’Artois, et c’est finalement Louis-Philippe qui arrive au pouvoir. Toute la famille royale embarque alors pour un nouvel exil en Angleterre

Chute et fin de la princesse aux yeux rougis

Madame Royale devient comtesse de Marnes

N’ayant pas eu d’enfant, Marie-Thérèse s’attache à éduquer les enfants de France, ses petits neveux, le duc de Bordeaux et Louise d’Artois. Elle tente également une ultime fois de soulever l’Ouest de l’Europe en faveur de sa cause, mais c’est un échec

La mort de son beau-père Charles X fait d’elle la reine de France et de Navarre auprès des légitimistes de la branche aînée des bourbons, mais elle finit par prendre avec son époux les noms de comte et comtesse de Marnes. Elle réussit en dernier fait d’armes à marier sa nièce Louise à Charles III de Parme, monarque régnant. 

L’Autriche, la dernière demeure de Madame Royale

Madame Royale le château autriche
Château de Frohsdorf en Autriche

En 1843, le duc de Blacas achète et donne à la famille royale le château de Frohsdorf en Autriche, qui y reconstitue un semblant de cour à échelle miniature. Ce sera la dernière demeure de Marie-Thérèse, qui meurt à 73 ans en 1851 d’une pneumonie

Sa mort retentit en France auprès des royalistes comme auprès de ses détracteurs : l’Orpheline du Temple n’est plus, et avec elle c’est une partie de l’Histoire de France qui s’en va. Des cérémonies religieuses sont organisées au quatre coin de la France, auxquelles assiste même Napoléon III. 

Comme ultime témoignage de son existence, certains de ses bijoux existent toujours et son exposés au Musée du Louvre. 

Ainsi, si Marie-Thérèse a eu mille surnoms et mille vies, celles de mousseline la sérieuse, de Madame Royale, de duchesse d’Angoulême, de première dame de France, de Dauphine de France, elle restera toujours à la postérité comme l’orpheline du Temple, et une des dernières figures de la royauté en France. À son nom restera attaché la douleur de la perte de sa famille, mais aussi le prestige dû à une petite-fille d’empereur, fille, soeur, nièce et belle-fille de rois. 


Sources :
– https://www.histoire-pour-tous.fr/histoire-de-france/3158-marie-therese-charlotte-de-france-duchesse-dangouleme-1778-1851.html
– https://histoire-image.org/etudes/derniers-moments-louis-xvi
– https://www.geo.fr/histoire/qui-etait-marie-therese-de-france-fille-de-marie-antoinette-et-louis-xvi-dite-lorpheline-du-temple-212465
– http://auria.fr/qui-est-madame-royale/
– https://www.youtube.com/watch?v=b3mjRK2iH-A
– https://www.histoire-et-secrets.com/marie-therese-de-france-fille-de-louis-xvi/
– https://www.chateauversailles.fr/decouvrir/histoire/grands-personnages/madame-royale