En histoire de l’art, la Renaissance est une période aux limites chronologiques floues. Par facilité, et pour les besoins de l’article, nous allons nous concentrer sur des œuvres réalisées entre les années 1450 et 1600. Le mouvement renaissant est caractérisé par une forte appétence pour l’Antiquité ainsi que par un goût prononcé pour les thèmes humanistes. En réaction à la perfection atteinte par les grands maîtres de la Renaissance, un style irréaliste et sophistiqué se développe dès les années 1520 ; le Maniérisme. Aux XVe et XVIe siècles, les thèmes picturaux les plus prisés sont empruntés à la Bible ou à la mythologie gréco-romaine. C’est en raison de cette seconde source d’inspiration que nous allons nous pencher brièvement sur 12 peintures célèbres de la Renaissance, 12, comme le nombre de dieux olympiens.
Dès le Trecento (XIVe siècle) se fait sentir un vent de renouveau artistique sur la péninsule italienne. Ce sont cependant les célèbres Quattrocento (XVe siècle) et Cinquecento (XVIe siècle) qui font rayonner la Renaissance en Italie, puis dans le reste de l’Europe. Le courant s’estompe au tournant du XVIIe siècle pour faire place au Baroque et au Classicisme.
La Renaissance, phénomène européen s’il en est, s’exprime dans les arts, la littérature, la science… Dans le domaine de la peinture, des artistes illustres marquent ces deux siècles, à l’instar de Léonard de Vinci, Raphaël, Michel-Ange, Albrecht Dürer, Le Greco, Jérôme Bosch… (Re)découvrons ensemble le travail de ces peintres brillants !
Léonard de Vinci, Annonciation, 1472-1475
Léonard de Vinci est connu dans le monde entier pour son génie et sa virtuosité. Dans cette œuvre de jeunesse, le peintre toscan met en scène l’épisode biblique de l’Annonciation, durant lequel l’archange Gabriel annonce à la Sainte Vierge sa prochaine maternité divine. Le drapé agité du manteau bleu de Marie trahit son trouble initial (conturbatio), puis, la joie immense qu’elle ressent à l’idée d’accueillir, dans ses entrailles, le futur Dieu incarné, Jésus-Christ. La flore luxuriante de l’hortus conclusus (jardin clos) évoque les fameuses tapisseries millefleurs.
Jérôme Bosch, Le Jugement dernier, après 1482
L’œuvre de Jérôme Bosch est marquée par les bestiaires médiévaux et le christianisme. Ses toiles dégagent une aura fantastique et mystérieuse, en témoigne Le Jugement dernier. Le thème de ce triptyque est à nouveau religieux. Ouvert, il offre à admirer au spectateur trois panneaux peints : à gauche, une vision du Jardin d’Eden, au centre le jugement des âmes par l’assemblée céleste, à droite, l’Enfer, chaos total et infernal.
Fermé, seuls les panneaux externes sont visibles. Ces derniers représentent respectivement Jacques de Zébédée et Saint Bavon en grisaille (peinture en camaïeu gris).
Quelques décennies plus tard, le terrible Michel-Ange propose sa version du Jugement dernier (1536-1541) pour la chapelle Sixtine au Vatican.
Raphaël, Le Triomphe de Galatée, 1513
Le grand Raphaël réalise cette somptueuse fresque pour la Villa Farnesina, à Rome. La gracieuse Galatée, qui se trouve au centre de la composition, se tient debout sur une conque équipée d’une roue à aubes, tirée par deux dauphins. La scène mythologique, provenant des Métamorphoses d’Ovide, est l’occasion pour l’artiste de représenter des beaux corps nus, à l’antique. Malgré l’agitation des personnages, l’œuvre conserve une harmonie bien réfléchie.
Le Greco, Le Martyre de saint Maurice, 1580-1582
Commandé au peintre extravagant à la fin des années 1570 par le roi Philippe II d’Espagne, Le Martyre de saint Maurice est un exemple bariolé de Maniérisme. L’œuvre, figurant parmi les plus célèbres peintures de la Renaissance, déplaît cependant au souverain et son entourage qui estiment que cette dernière ne respecte pas la direction artistique prônée par le Concile de Trente (1545-1563). Le Greco représente le moment où saint Maurice et ses compagnons choisissent de mourir en martyrs, plutôt que de renoncer à leur foi.
Titien, Vénus au miroir, vers 1555
Du côté de la Sérénissime, Titien impressionne par son colorito. Deux putti (enfants nus dans la peinture italienne) tiennent un miroir dans lequel une belle femme, une Vénus, se regarde… En s’approchant, l’on constate qu’en réalité la déesse nous regarde…! Version renaissante de l’arroseur arrosé.
Michel-Ange, La Sainte Famille à la tribune dite Tondo Doni, 1506-1507
Le divin Michel-Ange est un artiste qui excelle dans les arts dits majeurs : l’architecture, la sculpture et la peinture. Ce tondo (peinture sur support rond) lui permet de mettre en pratique ces deux derniers talents. En effet, la Sainte Famille, incluant Marie, Joseph et Jésus, est particulièrement sculpturale. La lumière se réfléchit sur les drapés à la manière de statues de marbre antiques. Ainsi, l’œuvre est une manifestation magistrale du paragone, débat animé agitant les sphères intellectuelles de la Renaissance qui vise à déterminer quel art entre la peinture et la sculpture (voire l’architecture) est “supérieur”.
Albrecht Dürer, Portrait de l’artiste tenant un chardon, 1493
Considéré comme l’un des premiers (le premier ?) autoportrait de l’histoire, ce jalon de l’art germanique figure parmi les peintures les plus célèbres de la Renaissance. Le chardon que l’artiste allemand tient dans ses mains est interprété de diverses manières par les spécialistes. Il peut s’agir d’une figuration de la couronne d’épines du Christ (Sainte Couronne), ou bien d’un symbole de fidélité conjugale (et dans ce cas, nous avons affaire à un portrait de fiançailles).
Sandro Botticelli, Le Printemps, vers 1480
Œuvre majeure à tous égards, Le Printemps de Botticelli est une peinture célèbre de la Renaissance qui illustre parfaitement la douceur dont sont empreintes les réalisations de l’artiste florentin. Les personnages mythologiques du tableau évoluent dans un jardin fleuri aux senteurs d’agrumes. Au centre, la Vénus païenne peut évoquer pour le spectateur chrétien une très chaste Vierge Marie.
Pieter Brueghel l’Ancien, Les Jeux d’enfants, 1560
Cette huile sur bois du peintre flamand Pieter Brueghel l’Ancien constitue une source très importante pour l’historien de l’époque moderne qui souhaite étudier les activités ludiques à la Renaissance. En effet, sont minutieusement représentés environ deux cents enfants jouant à des dizaines de jeux différents. Le tableau met donc en exergue de nombreux détails liés aux divertissements du XVIe siècle.
Paul Véronèse, Les Noces de Cana, 1563
Les Noces de Cana, l’une des peintures les plus célèbres de la Renaissance, est actuellement exposée au Musée du Louvre, face à l’iconique Joconde, un des tableaux les plus connus du monde. Véronèse, artiste vénitien du Cinquecento, peint ici un épisode néotestamentaire. Le Christ est, bien sûr, au centre de la composition. Juste en dessous de lui, un groupe de musiciens qui abrite, selon la tradition, un autoportrait du peintre, accompagné de ses confrères Titien, Tintoret et Bassano.
Jean Cousin l’Ancien, Eva prima Pandora, avant 1550
L’École de Fontainebleau peut être qualifiée de variante française du Maniérisme. Centrée autour du château éponyme, elle produit de nombreux chefs-d’œuvre raffinés, tel que l’Eva prima Pandora de Jean Cousin l’Ancien. Le peintre réinterprète avec brio le mythe de Pandore en mélangeant influences italiennes et nordiques.
Giuseppe Arcimboldo, Rodolphe II en Vertumnus, vers 1590
Peintre milanais et figure de proue du Maniérisme italien, Arcimboldo a réalisé quelques-unes des peintures les plus célèbres de la Renaissance. Il a notamment produit le portrait de l’empereur Rodolphe II sous les traits de Vertumnus, dieu étrusque des récoltes. Comiquement, une abondance de fruits et de légumes compose le corps et le visage du souverain, mi-verger, mi-potager. L’historien de l’art Daniel Arasse nous fait remarquer que le “front-citrouille” du personnage est une allusion discrète à la mélancolie (état dépressif) qui touche le prince Habsbourg. En effet, le mot italien zucca, qui se traduit par “citrouille” en français, peut également signifier “tête vide”.
Grâce à ces douze œuvres aussi splendides que diverses, nous avons succinctement survolé la production picturale européenne des XVe et XVIe siècles. La Renaissance, période propice aux inventions géniales des peintres (entre autres), n’a de cesse de nous séduire et de nous éblouir.
Sources :
- ARASSE Daniel, Le Détail. Pour une histoire rapprochée de la peinture, Paris, 1992.
- CLOULAS-BROUSSEAU Annie, Le Greco à l’Escurial: “Le martyre de Saint Maurice”, Studies in the History of Art, vol. 13, 1984.
- JOUANNA Arlette, La France de la Renaissance, Paris, 2001.
- PANOFSKY Erwin, La Renaissance et ses avant-courriers dans l’art d’Occident, Paris : 1976.
- https://collections.louvre.fr/
- https://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/maniérisme/64721